Quand un média, qui plus est, supporté par un réseau d’autres médias, pleure sur le fait qu’on lui supprime ses financements institutionnels, on est en droit de se poser la question sur le plan de développement de ce média, si ces journalistes qui se clament indépendants ont conçu un jour la véritable liberté de leur média, s’ils sont conscients de lantagonisme entre presse indépendante et subventions institutionnelles… Tous ceux qui oeuvrent dans ce domaine savent ce que les termes “subventions européennes” ou “label européen” cachent: une main mise certaine, un droit de regard, de la Commission européenne sur vos projets, travaux -ce qui en somme est logique, elle ne va pas subventionner des projets qui vont à l’encontre de ses idées, visions, valeurs…- et donc une bride sur le principe d’indépendance du média et des journalistes.
Très tôt, déjà fin 1990, Franck Biancheri a été l’initiateur d’organes d’information trans-européenne et s’est attaché à l’une de ses exigences: le multi-linguisme, le NewropMag lancé dans les années 2000 a été le tout premier média trans-européen sur internet à offrir des articles trans-européens, traduits en plusieurs langues, des revues de presse multi-lingues, permettant pour la première fois aux citoyens d’Europe et du monde d’avoir un regard sur les presses nationales. Il a été le modèle pour des sites comme Café-Babel, Euractiv, Agora-Vox, et même Presseurop, qui se sont inspirés de cette dimensionalors tout à fait innovante.
Contrairement à tous ces “petits-fils”, le NewropMag a toujours fonctionné sans subventions, sans financements extérieurs, en assumant de façon indépendante tous les frais que cela supposait, porté par Franck Biancheri et des équipes de jeunes rédacteurs, journalistes, les tous premiers blogueurs de l’information européenne sur internet, de vrais européens, de vrais démocrates, convaincus que la vraie information européenne doit être traitée, analysée et véhiculée dans toute la diversité des langues européennes auprès du plus grand nombre, de façon désintéressée et indépendante de tout pouvoir et surtout institutionnel.
Bien entendu on peut regretter la décision de la Commission, mais elle est somme toute logique, elle peut très bien faire elle-même ce travail de compendium et de traductions de l’information, se payer son propre organe sans avoir à subventionner une structure qui clame indépendance et liberté, et sans doute cette décision est-elle aussi motivée par le fait que ce sont les mêmes médias, les mêmes journalistes qui par ce biais sont rémunérés, subventionnés, deux fois, voir plus, accumulant, subventions européennes, subventions nationales, pour la presse écrite, pour les médias en ligne, pour les journalistes, pour les blogueurs, pour les traductions etc… etc…
Ce qui serait le plus regrettable et jetterait un nouveau discrédit sur le milieu de la presse et des médias, serait que les responsables de Presseurop et ses journalistes décident de ce fait d’arrêter leur projet et achèvent la victime en jetant le bébé avec l’eau du bain. Ce ne serait plus un assassinat mais un parricide.
Cela prouverait que les convictions qui les portent sont loin des réalités démocratiques européennes, celles de permettre à la plus grande majorité des citoyens européens d’accéder à l’information de toute l’Europe en toute indépendance et toute liberté. Cela prouverait également que la véritable presse européenne n’est pas encore née.*
Newropeans à travers son magazine en tout cas s’attachera à continuer le combat dans ce sens là.
* d’ailleurs il semblerait d’une part que la très forte émotion dans cette affaire soit purement franco-française, et d’autre part ne vos laissez pas abuser par le hashtag twitter #savePE: il ne s’agit pas de sauver une institution (en l’occurence vous pourriez penser au Parlement Européen) mais des interêts privés qui plus est politisés (Le Monde, Libération, Courrier International… toute une saveur bien gauchisante en France)…
* Marianne Ranke-Cormier a été rédactrice en chef de Newropeans Magazine jusqu’en juin 2012.